Partager la page Partager sur Facebook Partager sur Twitter Partager sur LinkedIn Partager par email Copier dans le presse-papier La terre crue pour une construction contemporaine Rénovation énergétique Publié le 26/09/2024 Lecture 3 minutes Le cabinet d’architectes de Clément Vergély a livré à Lyon, dans le récent quartier de Confluence, un bâtiment de bureaux en pisé. Ce procédé local à base de terre crue, remis au goût du jour, est également très efficace thermiquement. Explications sur une solution de construction bas carbone. Pourquoi avez-vous choisi de construire un bâtiment de bureaux en pisé ? Le règlement du concours sollicitait une expérimentation bas carbone pour ce bâtiment. Il m’a donc semblé intéressant de travailler avec un matériau local, que l’on trouve à seulement 30 km de Lyon. Techniquement, le pisé consiste à compresser mécaniquement des lits de terre crue. C’est une technique propre à la région lyonnaise et au Dauphiné. Il y a eu énormément de bâtiments en pisé à Lyon, jusqu’en mai 1856, date à laquelle des crues du Rhône et de la Saône ont emporté tous ceux qui se situaient en bordure du fleuve et de la rivière. Depuis, un décret interdisait toute construction en pisé. Nous avons dû passer outre ! Cette remise au goût du jour, en plein centre-ville, était stimulante. Redévelopper un savoir-faire, associer des artisans, solliciter de nouvelles vertus thermiques, c’était un beau défi. Nous avons montré que l’on pouvait utiliser ce matériau dans un contexte ordinaire de construction en ville. L’usage du pisé n’est pas réglementé. Comment avez-vous procédé pour convaincre de la viabilité du bâtiment ? Le pisé porte les planchers, c’est donc la difficulté majeure. Les piliers font 80 cm au rez-de-chaussée, puis 60 cm au premier étage. Et c’est sur le retrait que l’on vient poser le plancher. C’est la même chose pour le deuxième étage. Mais aucun règlement ne permet cette technique, inscrite nulle part au Document Technique Unifié. Il a donc fallu convaincre les assurances, au-delà des normes établies. Quand je me suis lancé avec le cabinet suisse de Diener & Diener, ils m’ont dit « Si tu y arrives, bravo ! ». Sans véritable référence, et pour répondre aux plus sceptiques, nous avons installé des sondes au pied des grandes arches. Un géomètre vient tous les trois mois afin de contrôler un éventuel tassement. Pour l’heure, il n’y a aucun problème, le bâtiment vit sa vie tout à fait normalement. Quatre ans après sa livraison, le pari est réussi, l’expérience est conforme à ce que nous attendions. Nous sommes contents d’avoir tenu bon. Le bon sens, l’histoire et le savoir-faire nous ont donné raison. En termes d’empreinte environnementale, quels sont les atouts du projet ? Tout d’abord, la matière première se trouve à quelques kilomètres. L’empreinte carbone du transport est donc quasiment nulle. De plus, l’inertie du pisé est extraordinaire : il permet la fraîcheur l’été, avec une régulation de la température et un vrai confort intérieur. Sans isolation, ni revêtement, le pisé est l’isolant à lui tout seul, c’est lui qui assure la régulation thermique. Ce procédé est réplicable partout en France, avec la nuance d’avoir cette fameuse matière première à proximité. C’est le cas à Lyon, ce ne sera pas pareil ailleurs, sauf dans la région toulousaine où l’on en trouve également. Mais s’il faut faire des centaines de kilomètres pour acheminer la terre crue par camion, le gain environnemental du projet est perdu et cela n’a plus trop de sens.