Partager la page Partager sur Facebook Partager sur Twitter Partager sur LinkedIn Partager par email Copier dans le presse-papier Faut-il laisser tomber le béton? Rénovation énergétique Publié le 27/01/2025 Lecture 3 minutes Comment se passer aujourd’hui du béton, un matériau si pratique et peu cher ? Architecte et enseignante, Alia Bengana co-signe la bande dessinée « Béton, enquête en sables mouvants » (Ed. Presses de la Cité), qui lève le voile sur une industrie responsable de 8 % des émissions mondiales de CO2. Elle plaide pour un retour des matériaux anciens dans la construction et la rénovation. Quelles sont les limites du béton, un matériau qui constitue 80 % des constructions dans le monde ? Sa fabrication émet beaucoup de CO2. Il faut chauffer le calcaire et l’argile à très haute température pour obtenir du clinker et la réaction chimique dégage énormément de carbone. Et les quantités produites sont énormes : 4,6 milliards de tonnes chaque année dans le monde. L’extraction du sable nécessaire à sa fabrication est également problématique avec 18 kg extraits chaque jour par habitant en France. L’extraction en rivière ou en mer provoque l’érosion des berges et des côtes, et de la perte de biodiversité. Le sable des fonds marins doit être lavé pour retirer le sel qui corrode le fer et fragilise le béton. Autre défaut, le béton armé doit être constamment entretenu quand il est exposé aux intempéries, ce qui est très coûteux et rarement pris en compte à la construction. Enfin, le béton armé produit des déchets en fin de vie ou demande un processus énergivore pour son recyclage. Et le recyclage du béton n’en est qu’à ses débuts. Existe-t-il des alternatives pour utiliser moins de béton ? Les matériaux biosourcés ou anciens comme la pierre, le bois, la terre crue, la paille sont de bonnes alternatives pour construire autrement, mais leur disponibilité doit toujours être vérifiées localement. Pour l’instant, leur usage progresse lentement. La France est toutefois le premier pays à avoir mis en place une réglementation environnementale visant à limiter les émissions de carbone par mètre carré construit, la RE2020. Elle va entraîner une diminution de l’usage du béton et une hybridation des matériaux utilisés pour la construction car il ne faudra pas dépasser un certain seuil d’émission de carbone. L’hybridation a toujours été un principe dans l’architecture vernaculaire, comme un enduit à la chaux sur un mur en pierre. Cette hybridation concerne aussi les usages, avec des bâtiments conçus pour durer plus longtemps, avoir plusieurs usages, ce qui nécessite de réfléchir au cycle de vie des matériaux et à leur réemploi. Face à l’ampleur des défis de la rénovation énergétique, ces matériaux anciens ont-ils de l’avenir ? L’isolation du béton se fait avec des produits industriels, le polystyrène, la laine de verre, les mousses, qui n’ont pas un cycle de vie vertueux et consomment beaucoup d’énergie pour être fabriqués. Les matériaux biosourcés, très vertueux, sont efficaces en rénovation énergétique. Les enduits naturels à base de terre crue se révèlent par exemple très efficaces pour réguler l’hygrométrie à l’intérieur des bâtiments. Mais les matériaux anciens se heurtent encore à des problèmes de coûts, de contraintes de mises en œuvre, de manque d’entreprises formées à ces techniques oubliées. Le réemploi des matériaux est également une pratique qui revient en rénovation, même si elle concerne surtout le second œuvre (cloison, revêtements, tuiles…). Dans la rénovation, il faudrait une charte pour favoriser le réemploi de certains matériaux. Une volonté politique est nécessaire pour favoriser et développer ces pratiques, comme une TVA réduite, des politiques de formations ambitieuses et des réglementations adaptées.